mercredi 10 avril 2013

Le cycle des Robots d’Isaac Asimov


Le cycle des Robots d’Isaac Asimov



Article paru sur le site de CDDJ, Ça dépend des jours, un e-zine. Article écrit par Benoît Ronflette.

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L'article en question :

Véritable pilier de la littérature de science-fiction et grand vulgarisateur de livres scientifiques, Isaac Asimov s’est rapidement fait un nom. Créateur de sagas reconnues, il est le génial inventeur des trois Lois de la Robotique. Et ça tombe bien, nous allons aujourd’hui nous intéresser aux Robots. Et plus particulièrement au fabuleux cycle des Robots, commencé en 1950 et achevé en 1985.


Disons le clairement, Le cycle des Robots peut être divisé en deux parties bien distinctes. Les deux premiers tomes présentent des recueils de nouvelles et des histoires courtes publiées par l’écrivain. Le tome initial est sobrement intitulé Les Robots ; le second Un défilé de robots.

Le premier tome englobe neuf petites histoires toutes racontées par un personnage récurrent chez Isaac Asimov, à savoir le Dr. Susan Calvin. Dès ce premier tome, il est étonnant de voir à quel point Isaac Asimov effectue des parallèles entre les robots et l’être humain à travers d’intéressantes paraboles. Une évolution partant de la primitivité et arrivant à la création d’une société presque utopique pour obtenir une égalité presque parfaite entre tous les continents et les hommes.

Les Robots constitue aussi une véritable révolution en ce qui concerne le monde des robots. Ce ne sont plus des machines bêtes et serviles. Elles réagissent à des règles bien strictes qui permettent toutefois à l’écrivain de jouir de multiples possibilités d’écriture. Les robots, chez Asimov, sont en proie au doute et possèdent des ébauches de sentiments. Voici les trois lois auxquelles ils sont soumis :

Première Loi : un robot ne peut porter pas porter atteinte à un être humain ni permettre, par son inaction, que du mal soit fait à un être humain.Deuxième Loi : un robot doit obéir aux ordres donnés par les êtres humains, sauf si de tels ordres entrent en contradiction avec la Première Loi.Troisième Loi : un robot doit protéger son existence, tant que cette protection n’entre pas en contradiction avec la Première et/ou la Deuxième Loi.

Le second tome est un rien moins bon après la véritable révolution qu’était donc le précédent. On y retrouve des personnages déjà célèbres comme Susan Calvin pour lequel l’auteur, dans sa préface, avoue son « amour ». Nous pouvons d’ailleurs y voir une forme de chaînon manquant entre l’homme et les robots. Elle est humaine, mais n’éprouve de l’affection que pour les robots. L’imagination de l’écrivain à travers les huit histoires de ce second tome reste d’ailleurs débordante et fourmille de références, notamment une claire allusion à la Guerre Froide dans l’une des nouvelles, même si toutes les nouvelles ne sont pas dignes d’intérêt — on ne s’attardera guère sur la nouvelle mettant en scène un bébé robot, par exemple.

Les quatre tomes suivants forment donc la seconde partie distincte et racontent les aventures d’Elijah Baley, un être humain qui va se retrouver plusieurs fois dans l’espace pour aider les Spaciens. Autre changement : on a affaire à des histoires complètes et non plus à des petites nouvelles.

Les cavernes d’acier évoque l’enquête d’Elijah Baley sur le meurtre d’un Spacien sur la planète Terre. Il sera, lors de l’investigation, aidé par un robot prénommé Daneel. Les Spaciens sont les descendants d’êtres humains ayant émigré de la planète Terre et qui ont colonisé d’autres planètes. Tout au long de ce troisième tome, Baley va devoir combattre son animosité vis-à-vis des Spaciens, mais aussi des robots. Une animosité désormais ancrée sur la planète Terre. L’incroyable richesse de l’oeuvre réside une nouvelle fois dans la pluralité, la multiplicité de façons dont on peut lire l’oeuvre. Il y a d’une part ce rapport entre l’homme et l’inconnu, qui le fascine d’une certaine façon, mais qui lui fait aussi affreusement peur. Le développement des robots est très important, à travers Daneel, aux caractéristiques humaines, mais dont la perfection agace Baley. Pourtant, au fur et à mesure que le récit avance, on constate qu’Asimov fait en sorte que son personnage humain comprenne que c’est à travers ses imperfections et surtout son âme qu’il est un être unique et extraordinaire. Alors que la perfection des robots les rend tout simplement inhumains et donc imparfaits. Rajoutons l’évolution qui semble tant effrayer les Hommes, parmi lesquels certains semblent vouloir obtenir un retour en arrière, vers le Médiévalisme (qui semble en réalité correspondre à notre époque). Et puis, il y a bien sûr l’avancée de l’enquête, qui maintient une forme de suspense vis-à-vis du récit, via les premiers échecs de Baley dans ses hypothèses.

Le quatrième tome est celui du grand départ pour Baley, qui doit enquêter sur une planète hors du système solaire. Or, un Terrien n’y a jamais été admis. Il s’agit de la planète Solaria. Face aux feux du soleil permet de constater à quel point Isaac Asimov est capable de se renouveler en permanence dans la manière de raconter des histoires tout en possédant un suivi logique par rapport à tout ce qu’il a créé auparavant. Il est fascinant de constater que l’écrivain est capable de prendre du recul sur les éléments qu’il a définis. Il se permet même de démontrer les limites des Trois Lois de la Robotique qu’il a inventées, en établissant par exemple qu’un robot peut blesser un être humain tant qu’il ignore que ses actes peuvent entrainer une telle conséquence. Un point de vue qui lui permet de repousser toujours plus loin les intrigues et d’ouvrir des possibilités de récit encore plus grandes. C’est aussi une évolution humaine importante puisque, dans le précédent opus, Elijah Baley ne supportait pas la lumière du soleil, le contact avec l’extérieur, etc., car la Terre s’est repliée et renfermée sur elle-même sous d’énormes couches de bétons, ne laissant rien filtrer.

Le cinquième tome, Les robots de l’aube, marque encore et toujours l’évolution de Baley face aux craintes de l’extérieur. Il entraine désormais un petit groupe d’hommes à affronter le monde. Il est alors appelé pour se rendre sur Aurora, la plus grande terre Spacienne, pour y élucider le meurtre d’un… robot. Il est encore une fois accompagné par Daneel, comme dans le précédent tome, pour y résoudre l’affaire. C’est aussi la possibilité de remarquer à quel point le personnage de Baley évolue face aux robots et de constater qu’il considère Daneel comme un ami et non plus comme un robot. Ce tome marque également de grands espoirs pour la planète Terre et ses peuples qui s’ouvrent enfin vers l’extérieur et reprennent l’envie de coloniser à nouveau des planètes, comme par son lointain passé. Cette aventure permet aussi l’apparition d’un nouveau robot, Giskard. C’est grâce à ce dernier que la fin de cet opus est très surprenante. Et c’est un personnage qui va avoir toute son importance dans le dernier tome.

Les robots et l’empire marque donc la fin du Cycle des Robots, cette fois-ci sans Elijah Baley. Des décennies se sont écoulées depuis son décès. Mais Daneel et Giskard, ainsi que Gladia, une Spacienne que Baley a aidé dans les deux précédents tomes, sont toujours en vie. Les Spaciens ont en effet une espérance de vie très longue. C’est évidemment un choc pour le lecteur d’apprendre la mort de Baley car Asimov avait réussi à faire de lui un personnage très intéressant et charismatique. Mais l’oeuvre possède véritablement l’aura de Baley car Daneel, à force de le côtoyer, a énormément appris de lui au point qu’il agit comme lui. Elément que ne manquera pas de lui souligner Giskard, le fameux robot du précédent opus, qui possède en fait des capacités télépathiques. Daneel invente une nouvelle loi de la robotique qu’il intitule la Loi Zéro et qui voit l’humanité dans son ensemble comme étant plus importante qu’un seul individu. Une loi qui va évidemment compliquer la tâche des deux robots puisqu’elle entre en conflit avec la Première Loi, qui leur impose de ne pas faire de mal à un être humain. Asimov opère donc une véritable révolution en suggérant que le fait de tuer un être humain peut permettre de rester en accord avec la Première Loi si, par cette action, l’humanité toute entière est préservée.

À cette saga, l’écrivain propose une fin triste tout en étant remarquablement ouverte. Il permet à son lecteur, à travers six tomes, d’aimer à sa manière les robots, de les voir comme des êtres dotés d’une forme d’intelligence et possédant autant d’importance que les êtres humains. Outre des aventures, des histoires et des enquêtes épiques, Isaac Asimov propose une saga au fond incroyable, comparant notre époque, l’être humain et son évolution à ce qu’il a fait avec ses robots. Pour cela, il utilise toutes sortes de styles et de formes, métaphores et paraboles. Mais il est impossible de ne pas voir dans les robots un être humain qui sommeille…

Nous reparlerons très prochainement d’Asimov puisqu’il est l’auteur d’un autre grande cycle qui a fait sa renommée : Fondation


Le cycle des Robots, Isaac Asimov | Tome I. Les Robots ; 318 pages ; ISBN 2290342483 | Tome II. Un défilé de robots ; 246 pages ; ISBN 2290311251 | Tome III. Les cavernes d’acier ; 373 pages ; ISBN 2290319023 | Tome IV. Face aux feux du soleil ; 308 pages ; ISBN 2290327948 | Tome V. Les robots de l’aube ; 527 pages ; ISBN 2290332755 | Tome VI. Les robots et l’empire ; 566 pages ; ISBN 2290311162 | Publié aux éditions J’ai Lu | Collection J’ai Lu SF |




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